LE CRI DU SHOFAR

LE CRI DU SHOFAR

Le dimanche 4 juin 2023 avait lieu un « Rassemblement en faveur du peuple Juif » dans le domaine du Musée du Désert, haut lieu du Protestantisme, situé dans les Cévennes (Gard).

Près de 500 personnes venues de différents pays ont voulu affirmer leur soutien au peuple juif à travers ce rassemblement au cours duquel Mme. Jip Wijngaarden (artiste hollandaise) a présenté au grand Rabbin de France, Haïm Korsia, un bas-relief en bronze représentant un homme voltigeant dans l’air, sonnant du shofar (corne de bélier), appelant à l’action et dans la tradition juive, à la repentance. Sous ce personnage, on voit quelques dizaines de personnes, certaines pieds nus, têtes baissées, les hommes portant soit un chapeau ou une kippa, une petite valise à la main, se dirigeant vers leur triste sort, vers les rails du chemin de fer qui les emmènera à la mort. De l’autre côté des rails, on aperçoit un petit village dont toutes les portes et les fenêtres sont inexistantes : elles restent fermées aux cris et aux appels de ces déportés, comme l’expliquera l’artiste.

Cette rencontre était rehaussée par la présence de certaines personnalités du monde politique, de l’Eglise Catholique, de nombreux pasteurs, ainsi que des représentants de la communauté juive de France et notamment le rabbin de Nîmes et le rabbin de Montpellier.

La cérémonie a débuté par quelques superbes morceaux de musique juive traditionnelle et klezmer interprétés par l’excellent quatuor « KolorBach ». Ensuite, le Conservateur du Musée du Désert, Denis Carbonnier, a parlé de l’importance de ce haut lieu du protestantisme qui a aussi été un endroit où des Juifs ont été cachés pendant la guerre. Patrick Cabanel (historien) a poursuivi avec un survol historique des relations entre Juifs et Protestants. Corinne Lafitte, chanteuse bien connue dans les milieux évangéliques a interprété un superbe chant basé sur la bénédiction aaronique qui faisait justement partie de la lecture de la Parasha du samedi précédent (Nombres 6 :22-27). Cette bénédiction s’adresse en tout premier lieu au peuple juif et Corinne l’a adressée aux Juifs présents. Ensuite ce fut au tour de l’artiste peintre Jip Wijngaarden de présenter le bas-relief qu’elle a réalisé à partir de son tableau intitulé « Le Shofar » au grand Rabbin de France après avoir expliqué que ce don est fait au nom de toute la communauté chrétienne et nous regrettons qu’elle n’ait « ouvert ses portes et ses fenêtres » au moment où le peuple juif avait le plus besoin d’amour et de soutien concret, pratique. Le grand rabbin a sonné le shofar qu’on lui a présenté expliquant qu’il allait nous faire entendre les cris du shofar qu’on sonne à Yom Kippour. Il a aussi cité cette déclaration d’Elie Wiesel : « Le contraire de l’amour ce n’est pas la haine, c’est l’indifférence ».  Etienne Lhermenault, Directeur de l’Institut Biblique de Nogent, a aussi pris la parole et nous a lancé un vrai défi par son discours de « mobilisation contre l’antisémitisme ». En voici quelques extraits : « …la saine et sainte discipline du souvenir ne suffit pas à éradiquer le mal tapi dans nos cœurs [...] …nous réécrivons la petite histoire et parfois la grande pour mieux nous exonérer de nos méfaits et de nos lâchetés ou pire, pour les justifier ! Pour le dire autrement, cultiver le souvenir de la Shoah est absolument nécessaire, mais pas totalement suffisant pour nous préserver d’une tragique rechute. Et nous chrétiens, nous ne devrions jamais oublier que nous avons été largement coupables d’avoir nourri cette haine antijuive dans l’Histoire ancienne et que nous sommes demeurés trop longtemps complices de ses conséquences par notre silence dans l’Histoire récente […] J’appelle nos communautés protestantes évangéliques ou luthéro-réformées et leurs pasteurs à combattre l’antisémitisme d’où qu’il vienne avec la plus grande fermeté […] J’appelle nos lieux de formation des ministres du culte, Instituts Bibliques et Facultés de théologie, à rappeler inlassablement que, sans Ancien Testament, il n’y en aurait pas de Nouveau. Sans peuple d’Israël, il n’y aurait pas de Messie et sans loi mosaïque et judaïsme, il n’y aurait pas de christianisme... Autrement dit, la foi chrétienne s’enracine dans l’histoire d’Israël. »

En conclusion, le Pasteur François Clavairoly (membre du comité directeur de l'association Amitié judéo-chrétienne de France), co-auteur de l’ouvrage « Paroles d’Alliance » avec le grand Rabbin Haïm Korsia, nous a encouragé à poursuivre ce rapprochement entre Juifs et Chrétiens.

Luc HENRIST

Luc Henrist