Le christianisme évangélique « Made in the USA » ?

De nos jours, on entend parler de « retour aux sources », à la « racine du christianisme », mais quand on pense aux origines des églises évangéliques (toutes dénominations confondues), il y a lieu de se demander, quelles sont leurs origines ?

 Les « Témoins de Jéhovah » est un mouvement fondé en 1870 par Charles Russell, dans l'État américain de Pennsylvanie, et les « Mormons » est un mouvement fondé par Joseph Smith, dans l’État américain de New York en 1830. L’Église Adventiste du Septième jour fut officiellement organisée en 1860 à Battle Creek, dans le Michigan (USA). Le mouvement des “Juifs messianiques” se développe aux États-Unis au début du 20ème siècle, surtout à partir des années 1960 sur les campus américains, ainsi qu'en 1973 avec la fondation des « Juifs pour Jésus » par Moïshe Rosen, un pasteur d'origine juive converti au christianisme en 1953.

D’un point de vue historique, la plupart des églises dites « évangéliques » sont des dénominations qui sont nées aux USA. Le pentecôtisme prend naissance en 1906 aux États-Unis avec l'évangéliste noir William James Seymour. En décembre 1906, Florence Louise Crawford, ancienne membre de l’église Azusa Street Mission à Los Angeles, lors du réveil d'Azusa Street, a fondé l’Apostolic Faith Church à Portland. D'autres confessions établies ont par la suite adopté les croyances pentecôtistes. En 1907, dans l’Église de Dieu en Christ. En 1908, dans l’Église de Dieu de Cleveland et dans l’Église pentecôtiste internationale de sainteté (International Pentecostal Holiness Church) fait de même. Ces dénominations vont alors envoyer des missionnaires en Europe, dès le début du 20ème siècle et ouvrir des églises dans nos pays européens.

Ce lien avec le pays d’origine (les USA) est fortement ressenti aujourd’hui. C’est ainsi que la plupart de nos chants sont simplement traduits de l’anglais. Le déroulement des cultes est sensiblement copié sur celui qu’on trouve dans les « Méga churches » des États-Unis ; la doctrine est souvent copie-conforme de celle de la dénomination d’origine.

Les Églises pentecôtistes se sont développées en France avec les prédications de l’évangéliste pentecôtiste anglais Douglas Scott et du pasteur danois Owe Falg qui ont commencé en 1930. Les Assemblées de Dieu de France sont ainsi fondées en 1932. En 1947, elle en compte 60. L’Institut de théologie biblique à Léognan a été fondé en 1968. En 2004, elle comptait 40 000 membres et 395 églises.

À l'origine, conformément à la théologie du Mouvement de sanctification, les pentecôtistes distinguaient trois étapes dans la voie du salut : la conversion également appelée régénération, la sanctification considérée comme une seconde bénédiction et le baptême du Saint-Esprit attesté par le parler en langues, considéré comme une troisième bénédiction. À l'heure actuelle, la plupart s'en tiennent à deux étapes : la conversion-sanctification d'une part et le baptême du Saint-Esprit d'autre part.

La théologie de la prospérité, qui s’est répandue dans les années 1970 et 1980 aux États-Unis, principalement par des télévangélistes pentecôtistes et charismatiques, est une doctrine particulièrement controversée dans les églises évangéliques. Elle est centrée sur l’enseignement de la foi chrétienne comme un moyen de s’enrichir financièrement et matériellement, par une « confession positive » et une contribution aux ministères chrétiens.

L'Église évangélique a ses origines dans la Réforme protestante du XVI e siècle et les mouvements de Réveil qui ont suivi. Il est évident que l’influence pentecôtiste se fait de plus en plus sentir dans l’Église évangélique traditionnelle qui intègre des éléments dans ses cultes et dans sa façon de présenter l’Évangile car ce sont les pentecôtistes qui ont le vent en poupe. Les « Assemblées de Dieu » est la plus grande dénomination pentecôtiste (également fondée aux USA) dans le monde et aurait 367.398 églises et 53.700.000 membres en 2022.

A la lumière de ces faits et de ces chiffres, il est indéniable de constater que l’identité « européenne » a pratiquement disparu de nos églises évangéliques aujourd’hui. Les idées des Réformateurs (européens) tels que Jean Calvin, Théodore de Bèze, Ulrich Zwingli, Guillaume Farel, Caspar Hedio, Marie Dentière, Pierre Viret, etc. semblent complètement oubliées, pour ne pas dire rejetées, par nos églises contemporaines.

Avec la 2ème guerre mondiale et l’arrivée des américains, la course au matérialisme ainsi que le mouvement évangélique ont définitivement fait leur entrée sur la scène européenne.

Mais est-ce qu’avec ce mouvement qui annonce le salut en Jésus-Christ, il fallait forcément que les européens perdent leur identité ? Ne pouvait-on pas rester sur la lignée de ces réformateurs européens et garder l’héritage musical de nos grands musiciens européens tels que Jean-Sébastien Bach et George Friedrich Händel ? Ils étaient tous les deux des chrétiens engagés qui ont écrit de la musique à la gloire de Dieu, telle que « Jésus que ma joie demeure » et « Le Messie » dont tout le monde connait le fameux « Alléluia ». Où sont passés le génie et la créativité de ces musiciens qui ont inspiré tant d’autres musiciens de leur époque ?

Non seulement nous avons perdu l’identité européenne du christianisme mais également l’origine et l’identité des fondateurs (Yéshoua, les disciples et les apôtres) de ce mouvement : Ils étaient tous Juifs… Cette réalité historique et biblique semble complètement oubliée, ignorée, pour ne pas dire rejetée, par la plupart de nos églises contemporaines.

Beaucoup ont oublié que « Le salut vient des Juifs » (Jean 4 :22)

 

Luc Henrist

Décembre 2023

 

Luc Henrist