Luc Henrist

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Antisémitisme : virus ou ignorance ?

Je reviens de France où j’étais à Nérac pour enseigner dans le cadre de la conférence : «Secourir la Maison de Juda». Pendant que nous étions là, un autre acte antisémite a eu lieu…


Le 4 juillet dans la soirée, un jeune étudiant juif (17 ans) de l’école «Ozar Hatorah» de Toulouse, devenue célèbre après la tuerie du 19 mars 2012, se trouvait dans un train l’emmenant à Lyon lorsqu’il a été agressé par deux individus. A l’aéroport de Toulouse dimanche passé, j’ai acheté le « Nouvel Obs » de cette semaine dans lequel on trouve un dossier spécial (annoncé en première page) : «Voyage au bout du nouvel antisémitisme»… Tout un programme dont on ne fait (évidemment) pas le tour car il faudrait, pour ce faire, non seulement plusieurs magazines, mais même plusieurs tomes de plusieurs centaines de pages chacun…

Car comme je l’ai constaté lors de la conférence à Nérac,  la vaste majorité des chrétiens français, suisses, belges, ne connaissent pas (ou très peu) ce sujet de l’antisémitisme et encore moins son histoire ancrée dans le christianisme… On dirait qu’ils pensent que cela ne les concerne pas… Que ce n’est que de la «vieille histoire» qui ne concerne que les juifs… On dirait que la plupart des chrétiens n’ont jamais pris conscience du fait qu’un des livres de leur Bible (le livre d’Esther) ne parle QUE de cela… et comment Dieu a utilisé cette femme (courageuse) pour ARRÊTER ce massacre… Si ce livre se trouve dans notre Bible, ne pensez-vous pas que c’est pour une bonne raison ? Et certainement une de ces raisons serait de nous faire comprendre que NOUS AUSSI, devrions prendre position et DÉFENDRE ce peuple (élu) lorsqu’il est attaqué ou qu’on parle de l’exterminer.

J’ai déjà exprimé, lors d’une interview pour la télévision, le fait que selon moi, l’antisémitisme est une « maladie spirituelle », c’est un virus transmis par satan lui-même à tous ceux qui au nom du «politiquement correct» ne veulent pas prendre position… Comme le dit si bien le proverbe : «L’indifférence, ça tue»… On l’a vu notamment pendant la 2ème guerre mondiale quand la vaste majorité des chrétiens n’a pas voulu ou n’a pas osé «prendre position». On me parle toujours des «Justes de France»… Oui, mais saviez-vous qu’il y en avait à peine 2.740, alors que le nombre de Juifs déportés de France était de plus de 75.000, soit 25% de l’ensemble des juifs en France, nationaux ou apatrides… ? Le nombre total des Justes parmi les Nations honorés à Yad Vashem est de 22.000, alors que le nombre total des victimes juives (seulement) est de plus de 6.000.000

Chaque chrétien devrait se poser la question : «Suis-je le gardien de mon frère (aîné)» ? Poser la question, c’est déjà y répondre…

Un des versets clés qui est revenu pendant cette conférence à Nérac est «Pour l’amour de Sion, JE NE ME TAIRAI PAS» (Ésaïe 62 :1) Alors je demande : «Est-ce que les chrétiens se taisent face à ces attaques constantes et à ce regain d’antisémitisme aujourd’hui, particulièrement en France ? Est-ce que les Églises de France, représentées par la FPF ou le nouveau CNEF auront la décence ET le courage de ne pas rester silencieux et de dénoncer publiquement ce regain d’actes antisémites ? Il faut savoir que, d’après une étude universitaire, c’est la France qui tient le triste record du nombre d’agressions antisémites répertoriées en 2011 dans le monde : France 114, Angleterre 105, Canada 68, Australie 30,  Ukraine 16, Russie 15, USA 13…

Je termine avec ce poème du Pasteur allemand Martin Niemöller qui n’a pas eu peur de prendre position pour les Juifs pendant la 2ème guerre mondiale. Il fonda la «Ligue d’urgence des pasteurs», soutenue par des protestants à l’étranger, et il adressa au synode une lettre de protestation contre les mesures d’exclusion et de persécution prises envers les juifs et envers les pasteurs refusant d’obéir aux nazis. Malgré les protestations, Martin Niemöller fut déchu de ses fonctions de pasteur et mis prématurément en retraite au début du mois de novembre 1933. Mais la grande majorité des croyants de sa paroisse décida de lui rester fidèle, et il put ainsi continuer à prêcher et à assumer ses fonctions de pasteur.

Niemöller fut arrêté en 1937 et envoyé au camp de concentration de Sachsenhausen. Il fut ensuite transféré en 1941 au camp de concentration de Dachau. Voici son poème, qui date de 1942 :

Lorsqu’ils sont venus chercher les communistes

Je n’ai rien dit, je n’étais pas communiste.

Lorsqu’ils sont venus chercher les syndicalistes

Je n’ai rien dit, je n’étais pas syndicaliste.

Lorsqu’ils sont venus chercher les Juifs

Je n’ai rien dit, je n’étais pas Juif.

Puis ils sont venus me chercher

Et il ne restait plus personne pour protester.